Les péripéties du vote de la loi anti-négationniste montrent chez les français d'origine arménienne plusieurs faiblesses :
1 - Alors que depuis 1965, ils avaient constamment informé l'opinion publique, ils ont abandonné ce travail depuis la 2001 date de reconnaissance du génocide de 1915 par la France. Première erreur !
2 - Alors qu'ils en avaient pu en avoir un apperçu en 2001, ils n'en ont pas tiré d'enseignements quant au travail de lobbying et de structuration du gouvernement turc. Bien au contraire, la reconnaissance en 2001 a joué un rôle démobilisateur important, avec un sentiment du devoir accompli. Deuxième grossière erreur !!!
3 - Concernant la loi anti-négationniste, il n'y a eu aucune information en direction du public et des médias sur cette question. On a exclusivement entendu les opposants à cette loi. Il n'y a eu aucune stratégie ou simplement de travail de communication et d'explication. Le résultat est que le grand public n'a pas compris notre démarche.
4 - Les français d'origine arménienne se sont par pragmatisme adapté au fur du temps au calendrier éle ctoral, aux moments où leurs élus sont le plus à l'écoute. Ils ont beau les solliciter tous les ans depuis 1965, les élus n'ont de réactions qu'à l'approche des périodes électorales. Cela a contribué à donner une affreuse impression de démarche électoraliste.
Du côté du gouvernement turc, on nous annonçait de l'évolution, de l'ouverture, de la tolérance... on a eu la confirmation que tout cela était faux et que le gouvernement turc s'arqueboutait plus que jamais sur sa posture révisionniste, menaçant de destruction tous ceux qui n'iraient pas dans son sens ou l'empécherait de continuer sa propagande négationniste.
Est-ce à c
ette Turquie que le Conseil Constitutionnel va apporter son soutien ? Est-ce cette Turquie arrog ante, qui travestie la vérité historique, qui bafoue les droits de l'homme et les valeurs humanistes que les Sénateurs sigantaires du recours auprèsdu Conseil Constitutionnel veulent voir entrer dans l'Union Européenne ?
Et que penser du silence quasi unanime des soi-disant progressistes turcs ?
Je faisais partie de ceux qui pensaient qu'il fallait, malgré ces 97 ans d'injustice, être toujours patient et donner s a chance au peuple turc de s'élever. S'il y avait eu une seule manifestation de turcs appelant leur gouvernement à la raison, j'aurai continué à y croire. Mais il n'y en a eu aucune ! Et cet épisode m'a fait comprendre que tout geste de tolérance était interprété comme de la faiblesse pour la diplomatie néo-ottomane.
A trois ans des commémorations du centenaire du génocide de 1915, que cela nous serve d'exemple, nous permette de tirer les leçons et de trouver les failles de cette politique négationniste. Il est venu pour nous le temps de parler autrement.
Et si demain, le Conseil Constitutionnel censure cette loi, cela sera considéré comme une défaite de la France et de l'Europe face à la Turquie, un nouveau 29 mai 1453.
Il y a un élément de satisfaction, c'est qu'à part le faussoyeur de mémoire qu'est devenu Jean Daniel, tous les autres qui se sont exprimés sur cette question, même les opposants à cette loi, ont admis qu'il s'agissait bien d'un génocide. Mais alors pourquoi nous interdire de défendre cette mémoire par la loi ? Quelle solution nous laisse-t-on pour cela ?
Enfin, le plus important ici est le message qui a été envoyé au Gouvernement et au peuple turc. Chaque mois, chaque année, nous reviendrons inlassablement à partir des cinq continents demander justice et réparation. A eux de décider s'ils veulent l'assumer et vivre cette tache à leur front aux yeux du monde, ou s'ils désirent réparer pour qu'enfin justice soit rendue et que nous puissions construire un avenir de paix...